(CercleFinance.com) – Les annonces de la Réserve fédérale ont clairement dopé le moral des investisseurs avant le long week-end de Pâques : Wall Street inscrit sa meilleure clôture depuis le 10 mars, mais aussi et surtout, les trois principaux indices ont retracé très exactement 50% du terrain perdu entre le 19 février et le 23 mars.
Les indices américains renouent avec leurs niveaux de la mi-août 2019, ou de début juin… alors que la conjoncture et les perspectives n’avaient strictement rien de commun avec celles de ce début de mois d’avril, sans parler du facteur “incertitude” (sur le cycle économique) qui est certainement plus considérable qu’au dernier trimestre 2008.
Meilleur score hebdo depuis novembre 2008 pour le Nasdaq
La hausse de +1,2% Dow Jones et de +1,45% du S&P 500 portent leurs gains hebdomadaires à environ +12,7% et +12,1% respectivement: le Dow réalise sa meilleure performance hebdo depuis 1938, le S&P depuis 1974 et avec +11% (vers 8.150 points) le Nasdaq affiche son meilleur score hebdo depuis novembre 2008 (avant une lourde rechute en décembre puis jusque début mars).
En ce qui concerne les valeurs du Russel 2000 (+4,7% ce jeudi et +15% environ sur quatre séances), c’est la meilleure semaine de toute l’histoire !
La Fed supprime carrément le risque
Maintenant que la Fed a dévoilé son plan spectaculaire, la hausse inexplicable de +8% de lundi trouve sa pleine justification… a posteriori.
Le prétexte du ralentissement de la pandémie était bien un conte pour enfant : il y avait forcément des ‘infos’ au minimum parcellaires sur l’imminence d’un énorme stimulus qui circulaient, alimentant des anticipations quasi euphoriques… mais personne n’avait envisagé que la Fed allait promettre qu’aucune entreprise, aucune municipalité, aucun emprunteur insolvable ne ferait faillite dans un avenir prévisible (2 mois, 6 mois, 1 an, nul n’en sait rien).
La banque centrale américaine supprime carrément ‘le risque’ en annonçant un nouveau plan de soutien de 2.300 milliards de dollars à l’économie américaine.
Jerome Powell confirme la poursuite de rachats massifs d’actifs jusqu’à ce que la pandémie permette une reprise d’activité normale.
Le président de la Fed dévoile une enveloppe de 600 milliards de dollars de prêts en faveur des petites et moyennes entreprises (prêts sur 4 ans, remboursement différé d’une année, soit une première échéance à fin avril 2021).
Ces prêts seraient accordés par les banques commerciales puis rachetés à 95% par la Fed, la banque émettrice ne conservant que 5% de l’encours.
La Fed achètera également pour 500 milliards de dollars de prêts court terme émis par les États, les comtés et les villes (les ‘mini-bonds’).
Beaucoup de ces émissions sont en catégorie ‘high yield’ (haut rendement) et ne font pas partie des actifs éligibles pour un Quantitative Easing (QE) : pour contourner l’obstacle, la Fed achèterait des ETF contenant des tranches ‘high yield’ et leur valeur serait garantie – comme des fonds d’Etat – en cas de problème (défauts, faillites).
Qui paiera la colossale facture ?
La Fed se déclare donc omniprésente et omnipotente sur l’ensemble des compartiments obligataires, y compris les émissions les plus risquées dont elle se déclare garante: elle assumera ainsi les pertes qui surviendront.
Mais qui au final paiera la colossale facture de ce “all-in” monétaire : Wall Street semble répondre “personne” !
Beaucoup anticipent que l’inflation est au bout de ce processus mais lors d’une interview accordée à CNBC, Jerome Powell affirme que l’inflation n’est pas le “souci le plus immédiat”, la priorité étant le soutien aux entreprises..
Il indique que nombre d’entre elles ont davantage besoin d’un soutien fiscal (exemption de taxes) que de nouveaux prêts.
Suite au gonflement de son bilan (qui pourrait doubler cette année, voir plus), elle commencera à le réduire quand l’économie sera vraiment repartie du bon pied : elle avertira les marchés d’un processus de réduction “très en amont”.
Réduction de la production de pétrole
L’autre temps forte de cette séance, c’est le plongeon de -8% du baril de pétrole après l’annonce que l’OPEP va réduire de 10Mns de barils/J (bpj) sa production alors que l’excédent quotidien est estimé à 35 millions de barils (c’est d’ailleurs l’équivalent de ce que produit l’OPEP).
Une ‘brève’ publiée par Reuters, évoquant une réduction de 20Mns de bpj avait fait flamber le baril de WTI vers 28,3$ en milieu d’après-midi: il en termine, après cette fausse nouvelle et un fort sentiment d’échec vers 23/23,2$.
Cette déconvenue fait rechuter Diamondbak de -7%, Halliburton -6,2%, Pioneer -6%, Schlumberger -4,7%, Valero -3,5%, Conoco -2,7%…
Puisque la Fed promet qu’aucune entreprise ne fera faillite cet été, United Airlines rebondit de +14,5%, America Airlines de +10,4%, Alaska Air +8,4%… et dans secteur également sinistré des croisiéristes, Norwegian bondit de +11,9%, Royal Carribean de +7% (et +65% sur la semaine).
Le S&P500 a également été soutenu par Tesla +4,4%, Autodesk +3,6% et Newmont +13,4%.
Le Nasdaq (+0,7%) a été freiné par Citrix -5,1%, Micron -4,5%, Intel -3,1%, Broadcom -2,6%, Qualcomm -2,4%, Gilead -2%.
Les annonces de la Fed soulagent grandement les établissements de crédit avec PNC Financial +10,4%, JP Morgan +9%, Regions +8,9%, Goldman Sachs +4,1%.
A noter cette semaine la spectaculaire hausse de 73% de Khol’s (+13,6% ce 9 avril), de +62% de Norstrom (+12% ce vendredi) : l’ETF ‘retail’ (XRT, distribution) a pris +25% cette semaine… puisque la Fed garantit que personne ne fera faillite !