
Par deux fois, Emmanuel Macron a usé d’une ficelle rhétorique où lui seul sait quel est l’intérêt du pays et celui qui le conteste est un mauvais Français.
La scène aurait pu être anodine. Lundi dernier, jour de rentrée des classes, Emmanuel Macron était en visite dans une école à Forbach, en Moselle. Flanqué de son ministre de l’Éducation nationale, il déambule, inspecte, questionne. Des caméras sont présentes, bien sûr. À quoi bon un tel déplacement, si ce n’est pour y pêcher quelques images savoureuses ? Seulement voilà, les caméras sont généralement accompagnées de leurs journalistes. Et ceux-ci ont une détestable habitude : ils posent des questions.
C’est l’un de ces reporters qui va provoquer l’ire du président de la République. Interrogé à plusieurs reprises sur sa stratégie de communication, Emmanuel Macron répond, agacé : « Les journalistes ont un problème. Ils s’intéressent trop à eux-mêmes et pas assez au pays. (…) Vous ne me parlez que des problèmes de communication et de problèmes de journalistes, vous ne me parlez pas de la France. »
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Arrêtons-nous un instant, pour être sûr de bien comprendre. Le président de la République est en déplacement dans une école. Il n’est pas venu prendre des décisions, conduire des négociations, recueillir des informations ou entamer une réflexion. Non, il est ici pour se faire filmer en train de déjeuner à la cantine avec des écoliers. Il est ici pour tourner des images et montrer son visage. En un mot : il est ici pour communiquer. Et voilà qu’un journaliste oserait l’interroger sur… sa communication ? Quel toupet !
Bref. Écourtons là ce couplet : l’hypocrisie de la remarque est si confondante qu’elle mérite à peine notre attention. C’est plutôt ce qui transparaît en filigrane qui doit nous interpeller. Car loin d’être un événement isolé, cette déclaration du chef de l’État évoque d’autres propos. Il y a quelques semaines, alors que sa cote de popularité s’effondrait et que les citoyens semblaient manifester une certaine appréhension à l’égard des réformes à venir, Emmanuel Macron déclarait : « Les Françaises et les Français détestent les réformes. (…) C’est un peuple qui déteste cela. »
Ces deux déclarations reposent sur des ressorts rhétoriques similaires. Dans un cas comme dans l’autre, le raisonnement pivote sur une généralisation abusive – « les Français », « les journalistes » – qui permet de frapper de discrédit tout un groupe d’individus en se fondant sur les torts supposés d’une partie d’entre eux. Aussi vieux que fallacieux, le procédé ne peut qu’attirer notre réprobation.
Cette généralisation permet ensuite d’ouvrir sur un type d’argumentation bien spécifique : le registre ad personam. Plutôt que de chercher à réfuter la position de ses contradicteurs, Emmanuel Macron s’emploie à disqualifier la légitimité de ceux qu’il présente comme des adversaires. Un reporter l’interroge sans ménagement sur sa communication ? Ce n’est pas que celle-ci soit mauvaise, ce sont les journalistes qui ne s’intéressent pas à la France. Les sondages d’opinion sont cruels à l’égard du chef de l’État ? Ce n’est pas que les réformes soient contestables, ce sont les Français qui ne sont pas réformables.
Avec Macron ou contre la France
On commence ainsi à deviner, chez le président de la République, une représentation pour le moins inquiétante de sa fonction. Il y aurait d’un côté Emmanuel Macron, serviteur dévoué de cette « France héroïque » avec laquelle il entend renouer, et de l’autre les « forces de l’ancien monde », engluées dans les idées du siècle passé. Dans une telle vision du monde, celui qui formule un désaccord avec le chef de l’État manifeste nécessairement son opposition avec l’intérêt du pays. On est avec Macron, ou contre la France.
Je force le trait, bien sûr. À l’excès, peut-être. Il ne s’agit nullement de qualifier Emmanuel Macron de dictateur en puissance. Mais de rappeler cette règle élémentaire du débat démocratique : en politique, rien n’est jamais intrinsèquement bon ou mauvais, juste ou injuste. Tout est toujours affaire de choix et d’incertitude. Personne ne peut se targuer de connaître la vérité, nul ne dispose du monopole de l’intérêt national, et chacun a le droit d’exprimer un désaccord sans se voir, pour autant, rejeter parmi les adversaires de la nation. On peut être contre Macron, sans être contre la France.
Clément Viktorovitch est docteur en science politique, expert en rhétorique et négociation. Il enseigne à Science Po Paris, à l’ENA et à l’École de guerre.
Source : ©Viktorovitch – L’inquiétant discours d’Emmanuel Macron – Le Point
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Et si.....
Ils l’ont élu! Qu’ils assument! PAUVRE FRANCE EN RUINE!
Patricia J.S. Cambay
Il est là pour pressurer le français, son patrimoine immobilier, ses économies, etc. Tout ce qui peut faire rentrer de l’argent dans les caisses des banques.
Nous sommes en faillite et on l’a mis en place pour réduire notre dette.
Point barre !
Tout le reste n’est que littérature.
Si seulement nous pouvions faire, comme à une certaine époque les USA ont fait, i.e. “effacer” nos 2.200 milliards de dette et reprendre à zéro, ce serait le pied !
Mais non seulement nous ne sommes pas les USA mais nous ne sommes même plus la France.
Advienne que pourra…..
Mourier.
Excellent petit article.
Louis GOYARD
Beau le jubilé,depuis 2000,on détruit la FRANCE,tué des éleveurs assidus avec des abattages dérisoires et injustifiés de cheptels sains qui n’ont que leurs yeux pour pleurer,formé des chomeurs alors qu’il manque beaucoup d’agents dans les lycées,qui travaillent dur et sont fatigués moralement et physiquement,mais personne n’en parle.Travailler plus pour gagner moins.Dans ce système,la dette sociale ne fera que s’accroitre.Nous paierons toujours les pots cassés des uns ou des autres.Vive la FRANCE.Mais ou est notre bon Général DE GAULLE qui avait redressé notre belle FRANCE.