LE SCAN POLITIQUE – Dans un long portrait que lui consacre M le magazine du Monde, l’ex-premier ministre ne mâche pas ses mots contre l’ancien président. «Ma vie politique est encore devant moi», veut-il croire.
Leurs «positions» semblent «irréconciliables». Longtemps loyal vis-à-vis de François Hollande, Manuel Valls a finalement décidé, en novembre dernier, de se lancer dans une stratégie d’empêchement contre le président sortant de l’époque, afin de le contraindre à renoncer à se présenter… Et se lancer ainsi à sa place dans la course à la primaire à gauche. Un épisode qui a fini de consommer la rupture entre les deux hommes, qui ne se sont jamais vraiment entendus sur les plans humain et politique. Interrogé dans M le magazine du Monde , Manuel Valls admet d’ailleurs carrément: «On ne se voit pas. Je n’ai rien à lui dire. Et lui non plus, sans doute». Durant l’un de leurs derniers entretiens, les deux anciennes têtes de l’exécutif ont cependant discuté d’Emmanuel Macron. «Tu n’as rien fait, car tu pensais que le missile était dirigé contre moi. Or il était dirigé contre toi», lui a lancé Manuel Valls. Selon lui, «l’arrogance» de François Hollande l’a conduit à «laisser faire car il était trop sûr de lui, il croit toujours qu’il est le meilleur».
Manuel Valls revient également avec une certaine distance sur sa propre situation, et la dégringolade politique qu’il a connue entre son départ de Matignon, en décembre dernier, et sa réélection de justesse dans la première circonscription de l’Essonne, en juin dernier. «J’ai ressenti une hostilité presque physique. Je suis lucide. Je sais que j’ai pris une partie de la foudre du quinquennat. La loi travail et le 49-3 ont ouvert un espace de contestation violente. S’est concentrée sur moi une partie du rejet. Mais j’ai aussi une part de responsabilité. C’est vrai, je suscite la violence», analyse-t-il. Pas de quoi le décourager pour autant, comme en témoigne son acharnement à être réélu député malgré une campagne compliquée. «Je n’étais pas candidat pour être candidat, mais pour survivre. Je ne pouvais pas rester sur la défaite de la primaire».
«Il faut être capable de reconnaître ses erreurs»
Persuadé qu’il remporterait largement la primaire de son camp et qu’il pourrait ensuite légitimement prétendre à la présidence de la République, Manuel Valls est tombé de haut lorsque sa défaite cinglante contre le frondeur Benoît Hamon a brutalement freiné son ambition élyséenne. «J’ai connu la popularité, il faut savoir accepter l’épreuve», relativise-t-il pourtant. «J’ai forcément incarné une forme de pessimisme. Il y avait une forme d’optimisme que Macron a su capter», décrypte-t-il encore. «Je n’ai pas eu de sas de décompression après Matignon. J’oscille entre la transgression et le rassemblement, je suis piégé. Macron, lui, était libre. Pas de passé, pas d’amis, pas de culture politique. Ça lui a donné une force… Et puis, il a eu de la chance», se souvient-il.
Malgré une certaine lucidité sur son faible poids politique, Manuel Valls n’a cependant pas renoncé à revenir au centre du jeu politique. «J’ai envie de peser. De quelle manière? Je ne sais pas encore. Ça ne sert à rien de se précipiter. Tout est devenu tellement imprévisible…», glisse-t-il. «Ma vie politique est encore devant moi», affirme-t-il carrément. En attendant, l’ancien premier ministre va se «poser» et «prendre (ses) marques». «Il faut être capable de reconnaître ses erreurs», conclut-il. Sans préciser quelles leçons il compte en tirer.
Source :© Le Figaro Premium – Valls a rompu avec Hollande : «On ne se voit pas, je n’ai rien à lui dire»