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LA CHRONIQUE D’ADRIEN GOETZ – Le chateau de Versailles remet en état de visite les salles Louis-Philippe pour accompagner l’exposition qui sera dédiée au souverain en octobre.

Les aménagements de Louis-Philippe à Versailles n’ont jamais eu bonne presse. Pour créer sa «galerie des Batailles», inaugurée en 1837, le roi des Français aurait commis le crime d’embourgeoiser Versailles, détruisant irrémédiablement des appartements princiers aux élégantes boiseries blanches. Le musée qu’il avait dédié «à toutes les gloires de la France» lui survécut et continua plus ou moins de s’enrichir jusqu’à la guerre de 1914.

[perfectpullquote align=”left” bordertop=”false” cite=”” link=”” color=”” class=”” size=””]Louis-Philippe avait compris que restaurer un monument historique de cette importance n’est viable qu’à condition de lui redonner un usage[/perfectpullquote]

Sous les toits, dans les salles des attiques, ordinairement fermées, tableaux historiques et portraits permettent de croiser l’ombre de l’impératrice Eugénie, le sourire de Stendhal et la moustache de Clemenceau. Si cette collection avait été complétée, la France posséderait l’équivalent de la National Portrait Gallery, un des musées les plus populaires de Londres. Or le XXe siècle a privilégié la reconstitution d’un Versailles du temps des rois Louis. Le moment est peut-être venu de reconsidérer cela.

Louis-Philippe avait compris que restaurer un monument historique de cette importance n’est viable qu’à condition de lui redonner un usage, qu’il faut restaurer à la fois les pierres et le sens – à cette date, un grand musée de l’Ancien Régime était politiquement impensable. Il a sauvé Versailles. Ce chantier a été le sien, il s’y est rendu en personne à chaque occasion, prenant bien garde de ne jamais y dormir: de la demeure des rois, il faisait le musée des Français. Fils d’un prince du sang devenu révolutionnaire, il transforma Versailles en écrin de cette pensée du juste milieu – qui semble en harmonie, de manière imprévue, avec le «et en même temps» d’aujourd’hui.

Poutine impressionné

Il fallait rallier les ultraroyalistes en créant les salles des croisades où les familles de la noblesse cherchèrent toutes à faire peindre leurs armoiries – et cela donna un ensemble néogothique unique en France, avec des chefs-d’œuvre de Delacroix et de Vernet. Il fallait satisfaire ceux qui voulaient imaginer Louis XIV, et on réinventa une chambre du roi un peu toc. Il fallait pour les nostalgiques de la Révolution et de la République des salles exaltant Fleurus etles généraux de la Liberté, on ajouta La Fayette et Rochambeau. Les Bonapartistes purent se satisfaire de voir les grandes batailles de Napoléon inscrites dans une perspective victorieuse, cette galerie où elles semblaient le prolongement de Bouvines, de Marignan et de Fontenoy. Le roman national, grâce à ce prodigieux dispositif, culminait avec le serment de 1830.

Réconciliation aussi des pôles artistiques opposés, romantiques et classiques reçurent des commandes de tableaux et de sculptures. Aujourd’hui, le pays a besoin de réconciliation, et Emmanuel Macron, attentif aux symboles, a reçu Vladimir Poutine, très impressionné, dans cette galerie des Batailles plutôt que dans la galerie des Glaces. Hélas, les architectes de Versailles ont été les derniers à comprendre que le temps était venu d’apprécier à sa juste valeur l’intelligente strate «juillettiste» qui compose la personnalité complexe du château.

L’installation de l’horrible grille archi-dorée, pour créer la fiction d’un retour à un état de la cour du palais sous l’Ancien Régime, a détruit ce que Louis-Philippe avait inventé: ces deux grandes ailes ouvertes pour accueillir le peuple, dans le musée de leur histoire. On a brisé son rêve au moment où il devenait possible de le comprendre et de l’expliquer aux visiteurs. Il est temps de s’en apercevoir.


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Source:©  Louis-Philippe: son jour de gloire est arrivé

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