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“On a fait le sale boulot contre Daech et maintenant on nous laisse tomber” : dans la communauté kurde de France, la colère monte

Ailleurs en Europe aussi, comme en Allemagne où des mosquées turques ont été vandalisées, la diaspora se sent « trahie », alors que les forces kurdes étaient en première ligne pour combattre les jihadistes de l’Etat islamique, aujourd’hui en déroute.

« Tous les Kurdes sont en colère. Les Turcs ont attaqué notre terre. Et personne ne dit rien. Avant, avec Daech, tout le monde avait besoin de nous pour faire le sale boulot. Mais aujourd’hui, on nous laisse tomber », dénonce les larmes aux yeux, Ismail Akgul, 55 ans, un commerçant à Paris.

« On a été trahis, par la Russie, par les Américains. (Le président turc Recep Tayyip) Erdogan agit comme un dictateur et personne ne bouge », abonde Meyti Tanriverdi, devant la vitrine de son restaurant kurde où grillent brochettes de poulet et aubergines farcies.

Comme tous leurs amis et leur famille, les deux hommes suivent avec anxiété l’offensive turque lancée depuis samedi dans la région d’Afrine, bastion dans le nord-ouest de la Syrie des Unités de protection du peuple (YPG), une milice kurde considérée comme terroriste par Ankara mais soutenue par Washington.

Depuis samedi, les Kurdes manifestent quotidiennement à Paris et dans d’autres villes de France pour dénoncer cette « invasion » dans laquelle 90 combattants des YPG et des groupes rebelles syriens pro-Ankara ont été tués, ainsi que 30 civils, la plupart dans des bombardements turcs, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme.

Les organisateurs d’un grand rassemblement prévu samedi à Paris espèrent « au moins 10 000 personnes » dans les rues, sur les 200 000 et 250 000 personnes que compte la communauté en France.

En Allemagne, on attend également 15 000 personnes samedi à Cologne (ouest) où la question est susceptible d’accroître les tensions intercommunautaires. Deux mosquées ont déjà subi des actes de vandalisme. Dans l’une d’elles, des vitres ont été brisées et le slogan suivant a été tagué sur sa façade: « Vengeance pour Afrine ! Lève-toi ! »

‘Plus confiance en personne’

Selma Akkaya, journaliste du quotidien kurde en Europe, Politika, n’est pas étonnée. « Les Kurdes sont fâchés. Quand Daech était terminé à Raqa, les Kurdes ont nettoyé la Syrie. Et après les autres Etats se sont unis contre les Kurdes. Le sentiment c’est ça », explique-t-elle dans le foyer du Conseil démocratique kurde en France (CDK-F) à Paris.

Quelques mètres plus loin, Agit Polat fait défiler sur son smartphone des photos de cadavres ensanglantés. « Les bombardements à Afrine constituent un crime de guerre. C’est un massacre, des dizaines de civils ont été tués, des femmes et des enfants. Ceux qu’Ankara considère comme des terroristes sont des personnes qui ont combattu Daech », s’émeut ce représentant du CDK-F qui fédère les 24 associations kurdes de France.

Dans les couloirs menant à son petit bureau sans fenêtre traînent des drapeaux et des affiches annonçant la victoire future sur « le fascisme d’Erdogan ».

Lui aussi dénonce le « silence inadmissible et complice » des pays occidentaux face à la « trahison » de la Russie « sans l’accord de laquelle la Syrie n’aurait pas ouvert son espace aérien aux bombardiers turcs ».

« Il y a le sentiment d’être lâché par la communauté internationale mais il ne faut pas oublier que le peuple kurde a mené sa lutte seul jusqu’à ces quatre cinq dernières années », ajoute-t-il avant de promettre: « les Kurdes vont faire reculer l’armée turque comme ils ont fait reculer Daech ».

« On est forts. Personne ne va les battre », insiste également le commerçant Ismail Akgul. Mais il prévient que « le peuple kurde commence à en avoir marre ». « Ce n’est pas la première fois qu’on nous lâche comme ça. A toutes les guerres c’est pareil. On ne fait plus confiance en personne », martèle-t-il.

Dans la communauté, on rappelle ainsi que la longue lutte pour la reconnaissance du peuple kurde a été émaillée de revirements et de promesses non tenues des puissances étrangères.

« Il se peut que les Kurdes un jour puissent dire: stop, nous ne sommes pas des personnes qui vont faire ce sale boulot. Et on peut se demander ce qu’il se passera alors », souligne Agit Polat.

Source:©  Les Kurdes de France blâment le silence « inadmissible et complice » de l’Occident

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