Après l’attentat de vendredi, l’opposition fustige un système de surveillance des personnes radicalisées à bout de souffle et réclame des mesures de fermeté.
Une fois encore, le profil de Radouane Lakdim, qui a semé la mort dans l’Aude vendredi au nom de l’État islamique alors qu’il est fiché «S» depuis 2014, soulève un vent de polémique sur le suivi des radicalisés en France. Consciente de l’immense émotion qui a gagné le pays et sans attendre l’hommage national rendu mercredi aux Invalides au lieutenant-colonel Arnaud Beltrame, l’opposition organise la fronde. À l’instar de Laurent Wauquiez, président de LR, elle dénonce la «coupable naïveté» d’Emmanuel Macron et réclame, pêle-mêle, le retour de l’état d’urgence, l’expulsion des étrangers fichés S ou leur placement en centre de rétention.
Revenant sur les attaques qui ont endeuillé vendredi Carcassonne et Trèbes dans l’Aude, le procureur de la République de Paris, François Molins, a confirmé lundi soir que la compagne du terroriste était elle aussi fichée «S». Convertie à l’islam à l’âge de 16 ans, cette Franco-Marocaine de 18 ans placée en garde à vue vendredi soir présente «tous les signes de la radicalisation»: «Elle a crié “Allah akbar” lors de son interpellation par les policiers», a révélé le magistrat, précisant qu’«elle n’a pas d’antécédents judiciaires». Si les policiers n’ont plus retrouvé de liens téléphoniques avec Radouane Lakdim depuis janvier 2018, elle a posté le 23 mars à 6 heures du matin, soit peu avant les attentats, une sourate indiquant que les «mécréants étaient promis à l’enfer». En dépit de cela, précise François Molins, «elle conteste au dernier stade de ses auditions avoir été associée au projet mortifère de son petit ami».
Plus que jamais, les fameuses fiches «S» pour «Sûreté de l’État» sont au cœur de toutes les questions. Brandies lors de chaque «ratage», elles font désormais figure d’épouvantail pour les services qui tentent de faire de la pédagogie pour expliquer ce que sont et à quoi servent réellement ces outils de renseignement. D’abord, les fiches «S» ne visent pas, tant s’en faut, que des islamistes en puissance. Selon un dernier décompte porté à la connaissance du Figaro, le nombre des personnes épinglées «S» se situe désormais à 26.000, dont 10.000 pour radicalisation. Ce qui signifie que les autres figurent dans la base en raison de leur appartenance à l’ultra-droite, à la mouvance anarcho-autonome, celles des activistes violents de type «black bloc», des hooligans et, bien sûr, les espions. À ce titre, les fiches avaient d’ailleurs été créées en pleine guerre froide pour marquer discrètement des agents secrets, en particulier les diplomates venus de l’Est et leur entourage, avant de cibler des Palestiniens, des Iraniens, des Arméniens au gré des mutations terroristes.
La carte du statu quo
«Contrairement à une idée reçue, la fiche S, qui figure dans le grand fichier des personnes recherchées, n’a jamais eu pour but d’interpeller un suspect signalisé mais, au contraire, de détecter son passage aux frontières à un moment donné, martèle un expert de la lutte antiterroriste. Quand la fiche s’active lors d’un contrôle, l’agent doit suivre un protocole strict, ne pas intervenir et alerter le service émetteur, que ce soit la Direction générale de la sécurité intérieure ou encore la Direction du renseignement de la Préfecture de police.» Les fichés «S» visent des individus sur des motifs sérieux, ayant eu par exemple la velléité de se rendre dans les zones de combats ou apparaissant dans le trafic internet toutes les nuits sur des sites djihadistes.
«Les services sont régulièrement sollicités pour cribler les suspects déjà inscrits afin de toiletter le fichier, confie un responsable policier. Mais le choix est cornélien: prendre la responsabilité d’effacer de la liste un salafiste qui n’a rien fait depuis des mois représente un risque que l’on pourra toujours nous reprocher en cas de passage à l’acte.» Jugeant pour sa part que la fiche S est devenue un «outil de police exposé à des critiques très politiques et source de nombreuses incompréhensions», l’ex-patron du Raid et député (LREM) Jean-Michel Fauvergue préconise d’y «faire un tri en fonction du niveau de dangerosité des personnes inscrites.» L’élu suggère aussi d’utiliser les «visites domiciliaires», auparavant appelées perquisitions administratives, prévues par la loi antiterroriste portée à l’automne par Gérard Colomb pour «purger en dernier ressort le cas certaines fiches S sur lesquelles les services n’ont pas d’informations». Sur le fond, aucun changement d’ampleur ne se profile à l’horizon. Comme si, contre vents et marées, l’exécutif avait décidé de jouer la carte du statu quo.
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Source:© L’efficacité des fiches S à nouveau mise en cause
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Chauchaud
C’est la politique pro arabe de la France qui est a remettre en cause.
Le porte parole du fichier S, un certain procureur M….s est a virer, car inefficace ou alors complice.