Après avoir trouvé in extremis dans la nuit de lundi à mardi un compromis au sein de son camp sur la politique migratoire, Angela Merkel a renvoyé la balle à son autre partenaire de coalition, le SPD.
Le mistigri passe d’une main à l’autre. Après avoir trouvé in extremis dans la nuit de lundi à mardi un compromis au sein de son camp sur la politique migratoire, Angela Merkel a renvoyé la balle à son autre partenaire de coalition, le SPD. Pour être porté par le gouvernement, l’accord devait effectivement être validé par le parti social-démocrate, qui va devoir surmonter ses réticences. Une réunion de coalition était donc prévue mardi soir pour réunir les dirigeants de la CDU, de la CSU et du SPD. Le répit d’Angela Merkel dans la crise gouvernementale ne devait peut-être être que de courte durée, si les sociaux-démocrates décidaient de s’opposer aux conservateurs.
«Beaucoup de questions doivent être discutées», avait lancé la présidente du SPD Andrea Nahles lundi soir, en commentant l’accord conclu entre la CDU et les frondeurs de la CSU. Celui-ci prévoit la mise en place à la frontière allemande de «centres de transit» et, le cas échéant, la reconduite des demandeurs d’asile dans les États membres où ils sont enregistrés.
Mais cette idée, appelée alors «zones de transit», a déjà été catégoriquement rejetée par les sociaux-démocrates en 2015! Ils refusaient «d’installer des prisons» à ciel ouvert en Allemagne. Pour beaucoup de responsables SPD, il est difficilement envisageable de valider trois ans plus tard une telle option. Pour le leader des Jeunes socialistes, Kevin Kühnert, qui avait mené une campagne virulente au printemps contre la reconduction de la grande coalition, le projet de la CDU-CSU est incompatible avec les idées du SPD. C’est «une provocation», a aussi déclaré l’ancienne secrétaire d’État à l’Intégration Aydan Özoguz. «Nous ne voulons pas de centres fermés», a prévenu plus prudemment le secrétaire général du SPD Lars Klingbeil.
Lors d’une réunion du groupe parlementaire, mardi matin, les ténors du SPD ont cherché à calmer les esprits. Les conditions ont changé par rapport à 2015, a souligné l’ancien président du SPD Sigmar Gabriel. À cette époque, entre 3 000 et 5 000 migrants arrivaient par jour en Allemagne. «Nous avions dit alors que nous ne voulions pas chaque jour remplir un stade de personnes et les y retenir. Les ordres de grandeur sont totalement différents aujourd’hui», a-t-il expliqué. Pour gagner du temps avant de rendre leur jugement, les dirigeants du SPD ont réclamé mardi des précisions de la part du ministre de l’Intérieur CSU, Horst Seehofer. Une deuxième réunion du groupe parlementaire est prévue mercredi matin sur le sujet.
Si le SPD décidait de bloquer le plan des Bavarois, la crise politique pourrait rebondir à Berlin. Mais le risque semble trop grand pour le parti social-démocrate. Au plus bas dans les sondages, le SPD aurait tout à perdre dans des élections anticipées. En attendant, les sociaux-démocrates ne décoléraient pas contre l’offensive des conservateurs bavarois et les divisions de la CDU-CSU, qui ont mis en péril le gouvernement. «Ils sont complètement barjots», a fulminé mardi l’ancien candidat à la chancellerie Martin Schulz. Au SPD, on est persuadé que d’autres crises sont à venir.
La rédaction vous conseille :
- Allemagne: Angela Merkel échappe à la crise politique
- Crise migratoire: un numéro d’équilibriste difficile pour Angela Merkel
- Trois semaines qui ont fait vaciller Merkel, la «chancelière des réfugiés»
- Migrants: l’Autriche se dit prête à protéger ses frontières
Journaliste
Correspondant du Figaro à Berlin
Source : © Le SPD rattrapé par la crise du gouvernement Merkel