CHRONIQUE – Le procès en populisme fait par le président français contre ceux qui n’adhèrent pas à son progressisme (Poutine, Trump, Johnson, Salvini…) est affaibli par sa propre pente illibérale.
Emmanuel Macron appelle les Français à se «réconcilier». Il veut aussi rapprocher l’Europe de Vladimir Poutine. Le président l’a reçu lundi au fort de Brégançon (Var) avant le sommet du G7, ce week-end à Biarritz. Mais ces louables intentions commencent mal. La grande plage de Biarritz sera vidée de ses aoûtiens, dès ce vendredi, pour laisser place à l’entre-soi des puissants, Russie exclue. La station balnéaire plus Bayonne et Anglet vont devenir des villes closes et surprotégées de possibles groupes violents. La fracture entre la société civile et le monde politique, cette séparation qui structure les démocraties malades, sera aussi visible qu’une pleine lune, du 23 au 26 août, dans cette partie du pays Basque sur le qui-vive. La logique qui a conduit le pouvoir à nationaliser ponctuellement un territoire, sans considération pour les estivants, fait douter des capacités de la macronie à respecter la vie des gens. La révolte des «gilets jaunes», citoyens maltraités, ne semble pas avoir été comprise de ceux d’en haut.
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Pour sa part, Poutine a eu beau jeu de rappeler devant la presse que les reproches sur les répressions d’opposants ne pouvaient faire oublier celles, plus rudes, contre les «gilets jaunes». En fait, le procès en populisme fait par Macron contre ceux qui n’adhèrent pas à son progressisme est affaibli par sa propre pente illibérale. Sa chasse aux «fake news» produit des lois qui contrôlent des opinions, quitte à les censurer. L’indépendance de la justice est un décor qui cache la soumission du parquet à l’exécutif. En octobre 2018, le président avait récusé, contre l’usage, trois candidats au poste de procureur de la République de Paris. Il a été établi, cet été, que le procureur de Nice, Jean-Michel Prêtre, avait menti sur les circonstances d’une blessure de Geneviève Legay, «gilet jaune» bousculée par la police. Le magistrat avait voulu éviter, comme allant de soi, des «divergences trop importantes» avec la version présidentielle. Macron, soutenu par son parti quasi unique, devrait éviter de faire la leçon aux autres.
Ce ne sont pas tant les Français qui doivent se réconcilier entre eux, comme le souhaite Macron. C’est lui qui doit répondre à la gravité de la crise de confiance qui s’installe et s’aggrave
Ce sont les peuples renaissants qui écrivent l’histoire, à rebours des utopies universalistes qui imposent le culte de la diversité à l’Occident décadent. Ce mouvement réactif affole les idéologues du laisser-fairisme et du métissage obligatoire. Dans cette résistance, Poutine est en première ligne. Son expérience de la faillite du communisme lui fait-elle percevoir des similitudes avec le destin du «diversitisme»? Ce dogme postnational promet aussi le paradis sur terre, à coups de trique s’il le faut. L’exclusion de la Russie du G8 en 2014, après l’annexion de la Crimée, n’a fait que l’inciter à resserrer des liens détestables avec la Chine totalitaire ou l’Iran des mollahs. En revanche, sa vision de la crise existentielle que traversent les nations malmenées par la mondialisation est de plus en plus partagée. Au cœur du G7, les dirigeants des États-Unis, de la Grande-Bretagne et de l’Italie se sont éloignés du prêchi-prêcha sur l’accueil de l’Autre. Le parti des Affreux (Poutine, Trump, Johnson, Salvini) pourrait bien faire des émules.
Ce ne sont pas tant les Français qui doivent se réconcilier entre eux, comme le souhaite Macron. C’est lui qui doit répondre à la gravité de la crise de confiance qui s’installe et s’aggrave. Le président a raison quand il déclare dernièrement: «Je ne crois pas que (…) la colère sincère d’une partie de la population soit derrière nous.» Mais, imprégné par l’impératif mercantile du grand mélangisme, il ne voit pas le trouble qu’il peut jeter auprès d’une opinion inquiète de l’envergure de l’immigration quand il déclare, à l’occasion des 75 ans du débarquement de l’armée d’Afrique en Provence: «La France a une part d’Afrique en elle.» Il est heureux que Macron rende hommage aux 350.000 hommes qui ont contribué à la libération du pays. Toutefois, son invitation lancée aux Africains, qui ne formaient qu’une partie des troupes et qui ont obtenu leur indépendance, à se sentir chez eux en France est une violence pour des Français oubliés: ils disent être devenus étrangers dans leur pays, à force de céder la place.
Le «diversitisme» à bout de souffle
«Tel philosophe aime les Tartares pour être dispensé d’aimer ses voisins», s’agaçait Jean-Jacques Rousseau. Le camp du Bien, pareillement, se croit exemplaire quand il s’ouvre à tous, au nom des droits de l’homme. Mais il ne voit rien du malheur de ceux qu’il côtoie. Ces délaissés restent en première ligne face à une «diversité» qui, sous l’effet de masse, n’entend plus se fondre. Le 14 juillet, les drapeaux algériens ont envahi les Champs-Élysées après une victoire en football. S’agacer de telles démonstrations étrangères, que l’Algérie ne tolérerait pas chez elle, vaut d’être soupçonné du pire. Personne ne s’indigne non plus, chez les pseudo-démocrates, d’entendre l’Italien Matteo Renzi, labellisé progressiste, assurer vouloir «empêcher le retour aux urnes voulu par Salvini». Des dirigeants qui redoutent le peuple avouent leur échec.
Le mur de Berlin s’est effondré sous les faussetés du communisme. Un sort semblable attend le « diversitisme » et son infernal vivre-ensemble
Une idéologie devient moribonde quand elle doit recourir à la peur, au mensonge, à la désinformation pour survivre. Le mur de Berlin s’est effondré sous les faussetés du communisme. Un sort semblable attend le «diversitisme» et son infernal vivre-ensemble. Rabâcher, outre l’apocalypse d’un Brexit dur, que seuls le réchauffement climatique et l’extrême droite sont les vraies menaces revient à détourner les regards sur le malaise identitaire des peuples affaiblis et la volonté de conquête de l’islam suprémaciste (voir mon blog). L’infantilisation du discours politique a même pris des allures affolantes, le 23 juillet, avec l’invitation à l’Assemblée nationale du gourou millénariste Greta Thunberg, 16 ans. Le Grand Réchauffement, cette vérité officielle, est une aubaine pour occulter le processus de remplacement des populations, cette constatation indicible.
Les idées neuves
Le «progressisme» produit des insultes. Mais il n’a plus d’idées neuves. Son ode à la diversité a comme dessein paradoxal d’instaurer un ordre mondial uniformisé. En revanche, c’est au cœur de l’antimondialisme que s’élabore le nouvel humanisme, sensible à l’âme des peuples et des nations plutôt qu’au tiroir-caisse et à l’homme remplaçable. De ce conservatisme qu’il rejette, Macron a des leçons à apprendre.
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Éditorialiste au Figaro
Source:© Ivan Rioufol : «Macron n’a pas de leçons à donner»