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Le président russe, Vladmir Poutine, et le premier ministre indien, Narendra Modi, le 6 décembre 2021 à New Delhi. MANISH SWARUP / AP

Egalement partenaire de l’Europe et des Etats-Unis, New Delhi s’efforce de ménager l’ensemble de ses alliés face aux bouleversements géopolitiques de la région.

L’Inde est l’ami de l’Europe, des Etats-Unis… et de la Russie. Le géant asiatique, qui a toujours fait le choix de jouer sur plusieurs tableaux, a accueilli, lundi 6 décembre, Vladimir Poutine à l’occasion du 21e sommet annuel Inde-Russie, une initiative lancée en 2000, sous la présidence d’Atal Bihari Vajpayee. Cette visite éclair de cinq heures du président russe dans la capitale indienne constitue une étape importante dans la consolidation de la relation entre les deux pays, alors que Narendra Modi a noué ces dernières années des liens étroits avec l’ex-président américain Donald Trump et son successeur démocrate, Joe Biden, et alors que la région est soumise à des bouleversements géopolitiques considérables.

Pour souligner l’importance de la rencontre, les Indiens ont fait valoir que le dirigeant russe effectuait sa deuxième sortie seulement depuis la pandémie de Covid-19. En juillet, il s’était rendu à Genève pour rencontrer le président américain dans le cadre d’un sommet bilatéral, mais il n’avait pas participé au G20 en Italie, ni à la COP26 de Glasgow en novembre.

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La visite n’a pas débouché sur de grands contrats militaires, en dehors d’un accord pour la fabrication de 600 000 fusils d’assaut russes AK-203 en Inde, dans l’Uttar Pradesh, et le renouvellement de l’accord de coopération militaro-technique pour une nouvelle période de dix ans, jusqu’en 2031. L’essentiel était déjà conclu. L’Inde a acheté en 2018 les S-400 russes, le système de défense antiaérien à longue portée, pour 5,5 milliards de dollars. Le secrétaire d’Etat indien aux affaires étrangères, Harsh Vardhan Shringla, a indiqué que les livraisons étaient en cours d’acheminement. Les S-400 devraient d’abord être déployés à proximité de la frontière occidentale pour faire face aux menaces du Pakistan et de la Chine.

« Décision souveraine »

New Delhi a maintenu ce contrat, défendant « une décision souveraine », malgré les menaces de Washington qui, en vertu de la loi américaine Countering America’s Adversaries Through Sanction Act, sanctionne les achats d’armements russes par tout pays ou entités.

« Nous avons assisté à des tentatives de la part des Etats-Unis de saper cette coopération et d’obliger l’Inde à obéir aux ordres américains et à suivre la vision américaine de la manière dont cette région devrait être développée. Nos amis indiens ont clairement et fermement expliqué qu’ils sont un pays souverain et qu’ils décideront des armes qu’ils achèteront et de qui sera un partenaire de l’Inde dans ce domaine et dans d’autres », a déclaré le ministre russe des affaires étrangères, Sergueï Lavrov.

Même si New Delhi a diversifié ses achats militaires auprès de la France et des Etats-Unis, Moscou reste le premier fournisseur d’armements de New Delhi. Les liens entre les deux pays se sont noués pendant la guerre froide et s’étaient distendus à partir des années 1990 et de la disparition de l’Union soviétique. L’Inde s’était alors tournée vers l’Union européenne, l’Amérique du Nord et l’Asie orientale.

« Au cours des dernières décennies, le monde a connu de nombreux changements fondamentaux et différents types d’équations géopolitiques ont émergé, mais l’amitié entre l’Inde et la Russie est restée constante. Les deux parties ont non seulement coopéré l’une avec l’autre sans hésitation, mais ont également accordé une attention particulière aux sensibilités de l’autre », a souligné Narendra Modi en préambule de sa rencontre avec Vladimir Poutine. Ce dernier a salué en l’Inde une « grande puissance » et un allié « sûr ». C’était la quatrième visite de Vladimir Poutine en Inde depuis son accession au pouvoir.

« Conflit permanent »

Il y a cependant une ombre au tableau dans les relations russo-indiennes : la Chine, alliée de Moscou, adversaire de Delhi. L’Inde fait face à une « agression non provoquée » à sa frontière nord depuis plus d’un an, a rappelé le ministre de la défense, Rajnath Singh, face à M. Lavrov, et à son homologue russe, Sergueï Choïgou, une référence au conflit au Ladakh dans l’Himalaya qui a éclaté à la frontière entre la Chine et l’Inde en mai 2020. Depuis le départ des Etats-Unis d’Afghanistan et le retour des talibans à Kaboul, New Delhi s’estime encerclé par ses deux ennemis, le Pakistan et la Chine.

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Pour Raja Mohan, directeur de l’institut d’études d’Asie du Sud, à l’université nationale de Singapour, deux autres facteurs limitent les possibilités du partenariat bilatéral : « Le conflit permanent entre le Kremlin et l’Occident » et « le fait que les Etats-Unis et la Chine soient désormais à couteaux tirés ». New Delhi tente de ménager ses différents alliés.

Les Russes ne voient pas non plus d’un bon œil la stratégie américaine dans l’Indo-Pacifique dans laquelle l’Inde est un partenaire engagé. « Nous avons exprimé notre inquiétude quant aux activités qui se déroulent dans cette région sous le slogan des stratégies indo-pacifiques, où nous voyons des blocs non inclusifs. Le dernier exemple en date est l’Aukus [Australie-Royaume-Uni-Etats-Unis] », a déclaré M. Lavrov lors d’un point de presse. Cette région est, au contraire, la priorité stratégique de New Delhi pour contrer l’influence de la Chine et ses tentaculaires routes de la soie.

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Source:© En Inde, Poutine et Modi réaffirment leur pacte militaire

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