Le président américain envisage de ne pas confirmer au Congrès l’accord sur le nucléaire.
Donald Trump veut tester son «art du deal» sur un négociateur plus oriental que lui. Tenu de confirmer tous les trois mois au Congrès que l’Iran respecte sa part de l’accord nucléaire conclu en juillet 2015, le président américain s’apprête à le dénoncer, pour mieux le «réparer».
L’échéance du 15 octobre approchant, le Conseil de sécurité nationale de la Maison-Blanche s’est prononcé en faveur d’une manœuvre censée concilier le rejet maintes fois exprimé par Trump du «pire accord jamais passé», dont il blâme son prédécesseur, et l’intérêt des États-Unis de le maintenir en l’état. Pour ce faire, il s’apprête à le «décertifier» devant les élus, sans pour autant les pousser à réimposer les sanctions qui avaient été levées. Le Congrès dispose de 60 jours pour en décider. Cette période serait mise à profit pour faire pression sur Téhéran et les cosignataires de l’accord (Allemagne, Chine, France, Royaume-Uni, Russie) afin qu’ils s’engagent à l’améliorer ou à le compléter.
Washington veut notamment remédier à la «clause crépusculaire», qui lève certaines contraintes après 2025, et forcer Téhéran à ouvrir des bases militaires aux inspections de l’agence nucléaire (AIEA). L’Administration Trump insiste aussi pour imposer de nouvelles restrictions à l’Iran sur ses «activités déstabilisatrices» au Moyen-Orient. Sont en particulier visés son programme de missiles balistiques et son expansionnisme régional, via son soutien financier et militaire aux milices chiites en Irak et en Syrie, aux houthistes du Yémen, au Hezbollah libanais et au Hamas palestinien. Le Pentagone a déjà décidé de riposter «plus énergiquement» aux gardiens de la révolution dans le détroit d’Ormuz. La CIA a confié le dossier iranien à Michael D’Andrea, ancien responsable de la traque de Ben Laden et des frappes de drones, laissant augurer d’un accroissement des opérations clandestines.
Menace militaire
Le président américain a rallié Paris et Londres à son objectif, mais pas à sa méthode. Lors de leur rencontre à l’ONU, Emmanuel Macron a souligné le risque de sortir de l’accord sans solution de remplacement. Un diplomate européen prévient que «la menace de bâton américain n’a aucune chance de marcher avec Téhéran si l’on n’ajoute pas des carottes».
La stratégie contorsionniste de Trump est soumise à plusieurs inconnues, notamment la prémisse que l’accord survive à sa dénonciation. Elle parie aussi que Washington ne sera pas exclu du jeu par les autres signataires, du fait de sa menace de rétablir les sanctions. Elle calcule enfin que Téhéran cédera à la pression. Cela suppose un front uni, non seulement des alliés, mais de l’Administration et du Congrès. Or, auditionné au Sénat mercredi, le général Joseph Dunford, chef d’état-major, a affirmé que «l’Iran n’a pas matériellement brisé» ses engagements et le secrétaire à la Défense, James Mattis, s’est prononcé pour «rester dans l’accord». Au Capitole, plusieurs sénateurs républicains opposés au deal lors de sa signature souhaitent aujourd’hui le préserver.
Dans l’épreuve de force qui s’annonce, la menace militaire est déjà implicite. Tom Cotton, sénateur de l’Arkansas proche de Trump, a déclaré mardi au Council on Foreign Relations: «Il n’y a pas de raison qu’on ne donne pas un peu de temps à la diplomatie.» Avant de préciser: «Il existe de nombreux précédents de frappes calibrées pour atteindre nos objectifs.»
Source :© Le Figaro Premium – Donald Trump engage un bras de fer avec l’Iran